Esperanza le 30 juillet 1863
Pour Joseph-Marie Dutruel
Mon très cher Père,
Je profite d’une occasion favorable pour vous donner de mes nouvelles, grâce à Dieu je me porte bien, mais j’ai eu beaucoup de disgrâce cette année, j’ai eu le malheur de perdre ma femme en suites de couche. Elle n’est restée que trois jours malade. Elle a seulement eu le temps de se confesser et reçu les sacrements, elle est morte en suite.
Je suis resté avec trois petits enfants, deux garçons et une fille (—–)
Le petit garçon qu’elle a accouché avant sa mort, qui est arrivé un mois avant sa maladie.
Elle avait accouché le jour de St François, tel qu’elle avait accouché de sa petite fille le même jour avant. Elle a été sépulturé le jour des cendres. Elle a eu une belle sépulture. Tout le monde qui s’est trouvé à la cérémonie des cendres n’ont pas même attendu sa (—-) pour accompagner la défunte au cimetière, quoique éloigné de l’église.
Tous les amis m’ont voulu prendre mes enfants, voyant ma position. J’ai remercié, je les ai gardés avec seulement le dernier. J’ai été obligé de le donner à la femme de Michel Echernier.
Je lui paye six piastres par mois. Il se porte très bien et grandit bien. Si je n’avais pas eu le dernier, je rendais tout et je me rentournais avec les deux autres en Europe.
Je suis dans ma maison comme dans un couvent, nous sommes que trois hommes. Si toutefois il y avait une bonne vieille qui se décide à venir dans le pays avec un de mes amis qui va en Europe et qui revient ici, on peut me l’envoyer, pourvu qu’elle soigne bien mon ménage et mes enfants. Elle sera bien venue et reçue. Je ne suis pas à la misère. J’ai une centaine de bêtes à cornes. Pour l’année prochaine, une quarantaine de vaches à lait. Par conséquent elle pourra manger du fromage, du beurre et du serac et tous les jours de la viande et bien payé.
Dans ce pays les messes sont chères. La sépulture de ma femme et les messes m’ont coûté plus de quarante piastres, et autre … deux cent cinquante francs, y compris les quatre messes chantées, on n’a encore point fait de sépultures dans la colonie telle que celle de André Roland et de ma femme.
Je suis un peu gêné pour l’argent en ce moment, quoique je suis bien. Si vous pouviez me faire le plaisir de m’envoyer quatre livres de chants de recueil qui sont de quatre signes un graduel double. Ici nous n’avons que des graduels du Vallais. Un vepperal, un cantique noté, (—-) paroissien romain, qui serviront pour moi et mes enfants. Vous pouvez vous adresser à François Boujon Maréchal qui était maire de la commune et du plainchant qui peut parfaitement vous indiquer où vous devez trouver le tout.
Sauf l’accident qui m’est arrivé, j’aurais fait apporter le grand (missel) ici. Nous en avons qui sont trop gaulois. On ne peut s’en tirer avec ces livres. Ici ce sont les chantres qui chantent l’épitre, ce n’est pas comme chez nous.
Veuillez me faire cette amitié ! Plus tard je puis vous renvoyer et sous peu ce que vous dépenserez pour ces affaires que je vous demande. Il n’y a rien qui me ferait plus plaisir que cela et après tous les … que j’ai et de caresser mes petits enfants.
Tachez de nz pas oublier votre enfant qui n’a jamais oublié les bons principes qu’il a reçu dans son jeune âge et qui vous embrasse de tout son cœur.
François Dutruel
